Damien Gouy incarne l’Empereur dans une pièce composée par Philippe Bulinge d’après un épisode réel, à la veille des adieux de Fontainebleau.
Qui saura jamais à quoi correspond exactement ce geste ? Les historiens l’ont beaucoup commenté. S’interrogeant sur les causes de l’empoisonnement, sur sa manière, sur les motivations, la volonté ou non d’en finir… Longtemps, on a pensé que l’Empereur avait pris une dose trop puissante d’opium pour calmer ses douleurs abdominales. Mais il s’agirait d’autre chose…
Dans Napoléon, la nuit de Fontainebleau, sous-titrée « la tentative de suicide de Napoléon », Philippe Bulinge, construit un huis clos nerveux, une confrontation douloureuse. Trois protagonistes : un homme qui souffre et s’énerve, l’Empereur qui a avalé une dose ancienne de poison, le Général Armand de Caulaincourt, qu’il a fait appeler au milieu de la nuit, enfin son médecin d’alors et chirurgien, Alexandre-Urbain Yvan.
On est dans la nuit du 12 au 13 avril 1814. Quelques jours après la première abdication qui a eu lieu le 6 avril, et la fin de l’Empire (on l’appelle ici encore Empereur, par simplification).
Un homme vaincu, lové au pied de son lit, comme un animal blessé, flottant dans une chemise de nuit. Un homme seul, dans le dénuement, face à son destin.
L’essentiel tient au face à face de Caulaincourt (Loïc Risser) et de Napoléon (Damien Gouy). La partition de celui qui bientôt rejoindra l’Ile d’Elbe, est ample et c’est dans ce qu’il dit que tout se tient. Caulaincourt ne détestait pas l’Empereur, mais n’en était pas un inconditionnel et c’est avec un vrai sens de l’Histoire et des nuances que Philippe Bulinge le fait parler.
Appelé à la rescousse, le médecin, dans cette vision, fait vomir l’empoisonné qui, de toutes manières, semble avoir avalé un produit un peu évaporé ou non conçu pour le faire mourir. Vincent Arnaud dessine avec précision cet homme affolé. Dans la réalité, il s’enfuit vraiment et jamais plus l’Empereur ne prononcera son nom…
C’est écrit avec précision et fluidité, très bien joué, mis en scène par l’auteur et son épouse Maude, dans des costumes bien dessinés de Marilyn Fernandez François, le décor minimaliste mais évocateur des Ateliers Intersignes et les lumières si justes de Rémi El Mahmoud.
De la belle ouvrage, portée par le jeu très sensible des interprètes. Damien Gouy passe par toutes les couleurs d’un tourment et de contradictions profondes. Loïc Risser trouve le ton idéal, distance et respect, fermeté tandis que Vincent Arnaud est parfait dans l’affolement. Un très bon moment.
A la Folie Théâtre, mercredi et vendredi à 19h30, jeudi et samedi à 21h00. Durée : 1h15. Jusqu’au 31 juillet. Tél : 01 43 55 14 80.