Le metteur en scène et comédien évoque la vie de sa petite soeur Marianne; Sous le titre Le Malheur innocent, un moment grave et beau.
C’est un lieu minuscule, non loin de la Place des Carmes. Le Théâtre de L’Isle 80. Lorsque l’on pénètre dans la salle sombre, on aperçoit un homme, assis au fond, dans le coin gauche. On reconnaît ce visage, cette silhouette. Plus près des spectateurs, sur le côté, un autre homme est assis. C’est François Chattot, haute figure du théâtre, qui veille sur son ami Jean-Louis Hourdin, qui se risque là à un exercice très personnel et touchant.
Sous le titre Le Malheur innocent il se livre à une « parlerie grave et joyeuse » en mémoire, en l’honneur de sa petite soeur Marianne. La dernière d’une fratrie composée en deux mouvements : les années trente, les années quarante. Jean-Louis Hourdin est l’avant dernier. Il pense que ses parents voulaient absolument une fille pour remplacer leur aînée, tuée par le bombardement américain des usines de Billancourt, plusieurs années auparavant, alors qu’elle venait de mettre à l’abri ses frères et soeurs dans la cave de la maison.
Marianne, enfant de remplacement, naît trisomique. Si le médecin de la famille s’en rend compte immédiatement, il n’éclaire les parents qu’un an plus tard. Ils ont eu le temps de se rendre compte…
Dès lors la petite fille est prise en mains avec patience, conscience, amour. Sa mère va lui apprendre à lire et à écrire et elle est intégrée dans une famille profondément catholique.
Georges Hourdin, le père, est un grand homme de presse qui a fondé des journaux, un groupe très fertile. Un homme de foi, également.
On ne dévoilera pas ici ce que nous dit Jean-Louis Hourdin. Il faut que chacun reçoive ses confidences au plus profond de son coeur. Il y a des documents, des films, et même une émission de télévision. Jean-Louis Hourdin lit des lettres, parle de sa mère, de son père. De Marianne. Une jeune fille des années 60 qui rêve d’écrire des chansons, lit « Mademoiselle Ange Tendre » et « Salut les copains ». de se marier, avoir des enfants.
N’en disons pas plus. Ce serait abîmer ce moment extraordinaire d’une grande pudeur par-delà la « parlerie ». Marianne a vécu jusqu’à 78 ans…
Pour les plus jeunes, rappelons-le : Jean-Louis Hourdin appartient à la grande génération de l’école du TNS. Il a joué dès le milieu des années 60, notamment sous la direction d’Hubert Gignoux et signé des dizaines de mises en scène depuis le milieu des années 70. A Avignon, on n’oublie pas Léonce et Léna et Liberté à Brême.
Quelques lignes rapidement jetées pour ce « tombeau » de fraternité et d’amour. Nous en reparlerons mieux.