Il a inventé sa manière : des causeries savantes et déliées qui lui permettent de saisir le monde dans sa complexité et de partager ses trouvailles et ses réflexions. Il est, ces jours-ci, au Museum d’Histoire naturelle, avec « La Visite curieuse et secrète ».
A part. David Wahl est franchement à part. Cet esprit très érudit, passé par des études de latin et d’histoire autant que par une formation de comédien, a mis au point, au fil des ans, sans renoncer à un travail d’interprète classique, des formes « spectaculaires » très particulières.
Il les nomme « causeries ». Entendez qu’il attend de l’écoute une exigence véritable : ces « causeries » sont savantes et audacieuses et, si elles sont très divertissantes, demandent une attention très haute.
Après « Histoire de fouilles » ou « Le Sale discours », en tournée jusqu’au printemps, revoici un texte créé il y a déjà plus de cinq ans –et publié aux éditions Archimbaud/Riveneuve dans un très joli format. « La Visite curieuse et secrète » est sous-titrée « ou relation véritable des choses inouïes se passant en la mer et ses abysses ». Elle nous entraîne dans l’espace et le temps et, pour résumer abruptement, nous apprend beaucoup sur la vie des manchots, des pingouins, des grands pingouins. Et des manières dont les hommes les traitent.
Ces jours-ci, c’est au Museum d’Histoire Naturelle, à Paris, que David Wahl nous propose, avec la complicité des équipes de l’institution, évidemment, une plongée justement abyssale.
Quelques chaises, au cœur du bâtiment. Un espace confidentiel aménagé légèrement pour installer une atmosphère particulière. Des éclairages à la bougie, des projections, un bureau et sur un pied, un manchot naturalisé, tout petit et fragile d’apparence.
Veste bordée de fourrure, bottes de caoutchouc, l’homme qui s’adresse à nous, regard profond et bon, barbe de loup de mer, est très volubile.
David Wahl a de nombreux dons, mais le plus profond est la manière qu’il a de vagabonder au cœur de ce qu’il a découvert, appris, de toutes ces pages savantes qu’il a lues pour construire ces causeries délicieuses.
Il donne le sentiment de vagabonder : mais il sait très bien où il veut nous conduire. On passe par des sentiments très contrastés. Nul faux attendrissement devant le monde animal. Mais une lucidité et une admiration puissante devant des destins contrariés…
Histoire, géographie, remarques amusantes, épisodes cruels, tout ici touche. Au commencement, il y a la rencontre de David Wahl avec un pensionnaire d’Océanopolis à Brest qui est l’un des partenaires du Quartz, le théâtre, scène nationale qui travaille avec le centre de culture scientifique et technique dédié aux océans.
Ce pensionnaire se nomme Dominique. On le découvre sur une photographie en compagnie de David Wahl. C’est un manchot royal : il a des taches auriculaires orange vif en forme de cuillère et la base de la mandibule inférieure orange à rougeâtre (on recopie ici la définition). Dominique a été sauvé : un œuf fêlé déposé en couveuse et voici Dominique qui porte le prénom d’un ornithologue qui n’était pas certain qu’il fallait tenter de sauver le futur superbe manchot royal.
Dominique ne connaît que les hommes et s’est pris de passion pour David Wahl.
On n’en dira pas plus : charme, belle histoire, avec ce qu’il faut de cruauté. Un moment hors du temps à partager d’urgence.
Dans le grand jardin, cependant, les animaux, les mers démontées, d’un océan réinventé en couleurs et lumières par des artistes chinois, veillent dans la nuit, bleu fluo ou orange…Une fantasmagorie qui ravit le grand public, mais qui ne vaut pas les confidences du conférencier savant et sentimental.
Museum d’Histoire naturelle, du 13 au 17 novembre. Durée : 1h15. A 20h30.
Tous renseignements : www.davidwahl.fr
Vous pouvez aussi adopter une statue du Jardin des Plantes et aider à la restauration des œuvres. Tous renseignements :
Tél : 01 40 79 53 45.