Pour l’édition 2021, Jean Robert-Charrier a réuni des spectacles originaux et séduisants, déjà vus, ici et là. Mais il tente également quelques créations. Un festival pour le public, avec de grands artistes. Et, au cœur, Catherine Hiegel.
C’est l’avant-propos, sans amertume, du jeune directeur du Festival d’Anjou.
« On a fabriqué tous ensemble un joli Festival 2020. On l’a annulé.
On a construit des belles hivernales 2020. On les a annulées.
On a tricoté. Détricoté. Retricoté.
On a réussi à reporter parfois. On a dit adieu d’autres fois.
On a vraiment eu très peur jusqu’au dernier moment de devoir
encore oublier cette édition 2021.
On est passé entre les gouttes. On a même slalomé entre les
averses.
Grâce à Monsieur le Préfet on va pouvoir jouer et laisser rentrer les
gens chez eux jusqu’à minuit. Ça, c’est bien.
On a dû annuler les représentations des trois spectacles de Joël
Pommerat qui devaient se jouer au Quai et être le squelette de la
programmation du Festival d’Anjou 2021. Les choses étaient trop
incertaines pour les représentations en intérieur. Ça, c’est beaucoup
moins bien.
Mais ils reviendront, c’est sûr, et pas qu’un peu.
On a décidé que le Festival d’Anjou 2021, après une telle année,
devait être une grande fête.
On a voulu en faire une édition joyeuse et toujours exigeante,
accessible. »
Ecoutez-le. Dans sa simplicité, sa sincérité. Anjou, c’est l’un des plus anciens rendez-vous que compte l’Europe. Créé en 1950 (Avignon, c’est 47). Il n’est pas un festival de création, comme veut l’être son aîné. Il est une manifestation de reprises d’excellence, que l’on offre à un public qui n’a pas eu le loisir de découvrir les productions, dans la capitale ou dans les grandes institutions françaises.
Mais l’on connaît des parisiens qui ne se priveraient pour rien au monde de quelques soirées dans la douceur angevine.
Albert Camus, Jean-Claude Brialy, Francis Perrin, Nicolas Briançon, s’y sont succédé. Aujourd’hui, 25.000 spectateurs au moins répondent présent. Jean Robert-Charrier a dû essuyer l’annulation 2020, puis d’autres tentatives. Mais il a monté une formidable programmation pour ce printemps et le début de l’été. C’est la 71ème édition !
Croisons les doigts, mais le ciel semble s’être mis de la partie, comme le laissait entendre l’affiche d’un bleu idéal.
Hier, le 9 juin, tout a commencé par l’un des plus beaux des spectacles créés ces dernières saisons. Avec son titre mélancolique et les humeurs changeantes des personnages de Goldoni : Une des dernières soirées de carnaval…Un monde s’efface…On joue, on chante, on danse, on fait la ronde, on persiffle et l’on souffre. On rit, on pleure, on aime. Clément Hervieu-Léger a réglé d’une main sûre et avec un tact infini cette comédie douce-amère.
Ce soir, c’est la férocité corrosive de Dorothy Parker qu’a choisie Zabou Breitman. Une création. Un moment que nul n’a encore pu voir et que vous offre le festival d’Anjou.
Dans les jours qui viennent, les pépites se succèdent, et, on l’a dit, rieuse et profonde, Catherine Hiegel va vous faire rire, vous bouleverser. Le 17 juin, Marcial Di Fonzo Bo signe la mise en scène d’un texte dont Jean-Luc Lagarce avant fait son miel : Les règles du savoir-vivre dans la société moderne. Autant de soirées à ne pas manquer : Richard Bohringer, que chacun est heureux de retrouver dans Traîne pas trop sous la pluie, Fabrice Luchini, Edouard Baer, Agnès Jaoui, Jane Birkin, Grégory Gadebois, Michel Fau qui finira en beauté avec un grand Molière…Tout le monde est sur le pont. Renseignez-vous et courez !
Festival d’Anjou. 71ème édition. Dans des lieux magnifiques d’Angers et de la région. Jusqu’au 2 juillet.