Sur un texte de Leslie Kaplan mis en scène par Elise Vigier, Marc Bertin évoque l’écrivain en compagnie du jeune danseur Jim Couturier.
Tout ce que l’on pourrait dire à propos de ce moment qui dévoile sur scène un texte intitulé Le Monde et son contraire, ne ferait que l’alourdir et plomber de niaises considérations quelque chose dont la qualité première est l’évidence…
Dans la petite salle des Plateaux Sauvages, une salle fermée d’une série de volets qui occultent des fenêtres donnant sur un bout de jardin et la rue, mais des fenêtres avec lesquelles on peut jouer, bien sûr, Le Monde et son contraire est un petit fruit déguisé de délectation dramatique, poétique, intellectuelle, sensible.
Leslie Kaplan connaît l’œuvre de Kafka. Un écrivain qu’elle aime et cite souvent. Elle a vu un jour Marc Bertin jouer « le personnage » de Kafka dans un spectacle de Frédérique Loliée et Elise Vigier. Elle a été frappée, émue.
Elle a proposé de composer un « portrait d‘acteur » dans le cadre de la série initiée par la Comédie de Caen. Elise Vigier et Leslie Kaplan ont dialogué.
Pas même une heure. Deux artistes sur le plateau. L’un danse, sans jamais surligner ce qui vient d’être dit –mais éclaire et parfois réplique, montre qu’il écoute, attentif. Il glisse, saute, gambade, dessine de très harmonieuses figures, rampe, se fait double, rompt. Un jeune danseur de grande présence et harmonie, Jim Couturier.
L’autre s’adresse à nous, sérieux, grave. Nous le connaissons depuis longtemps. Depuis le groupe T’Chang et Didier-Georges Gabily. Il est d’un caractère indépendant, un défricheur. Ici en belle entente artistique avec chacune et chacun, Marc Bertin. Avec ce je ne sais quoi de mélancolique et de pince-sans-rire à la fois. Une voix, un regard. Une forte personnalité, lui aussi.
Il y a des livres, des dessins très beaux, des sièges, une table. Un grand espace de jeu et un texte très fin et délié de Leslie Kaplan, très bien dirigé, comme une musique, par Elise Vigier.
De la musique, il y en a. En bouffées intenses signées Manu Léonard et Marc Sens. Parfois, on est si pris par cette présence de la musique, que le texte se voile. Mais tout nous parvient pourtant et on brasse ici des questions vitales, existentielles, au-delà même des apparences.
Un bref et très grand moment.
Les Plateaux sauvages, lundi au vendredi à 20h00, samedi 14h30 et 18h00. Durée : 1h00. Jusqu’au 3 juillet.
lesplateauxsauvages.fr