Pierre-François Roussillon, un artiste s’efface

Musicien, directeur d’institutions, il s’est éteint le 10 mai, à soixante-trois ans. Une sensibilité profonde, une discrétion de tout l’être, il va nous manquer.

Dans le monde du théâtre, chacun le respectait. Il avait été le directeur audacieux, courageux, d’institutions importantes. Il avait du goût. Il défendait les artistes. Il était lui-même un musicien très sensible qui, au cours de son chemin, put donner la mesure de ses talents profonds de clarinettiste et de saxophoniste.

Sa noblesse frappait. Il était accueillant, discret. On le connaissait par le grand travail qu’il accomplissait, protégeant la création, donnant aux institutions qu’on lui confiait de la force et de la lumière.

Il était né en 1962. Enfant de la balle. Il était le fils de Jean-Paul Roussillon l’une des plus grandes personnalités de la Comédie-Française. Son frère, Baptiste, formé lui comme comédien à l’école des Amandiers, était très proche. Ils se ressemblaient, ces deux frères, avec leur visage fin et leurs yeux clairs. Ils ressemblaient au jeune Jean-Paul, mince comme un fil, idéal Arlequin !

Pas simplement des enfants de la balle, Pierre-François et Baptiste, mais des aristocrates du métier.

C’est trop jeune pour mourir, un peu plus de soixante ans. Les témoignages sont très nombreux, venus de tous les lieux où Pierer-François Roussillon a laissé son empreinte chaleureuse de grand bâtisseur.

La ministre de la Culture a publié un hommage qui montre que son cabinet connaissait bien cet homme aussi énergique directeur d’institutions que musicien ultra-sensible. On peut ici citer ce texte composé par quelqu’un qui connaissait bien les talents de Pierre-François Roussillon. Et son remarquable parcours.

« Personnalité connue et respectée du monde de la musique et du spectacle vivant il a marqué l’ensemble des structures qu’il a dirigées comme musicien, programmateur de festivals, directeur de compagnie, de maisons de la culture et de Scènes nationales. Issu du monde du théâtre, Pierre-François Roussillon s’était ensuite tourné vers la musique, menant, de 1980 à 2000, une carrière de clarinettiste. Pendant cette période, il avait fondé l’Ensemble Concordia et le Trio à vent de Paris, deux formations composées de solistes de l’Orchestre de Paris, de l’Orchestre National de France et de l’Ensemble inter contemporain. 

Désireux de mener ses propres projets artistiques, il avait dirigé successivement le Théâtre de la Butte d’Octeville dès 1999, puis le Trident, Scène nationale de Cherbourg-Octeville, en 2002. En 2006, il avait pris la tête de la Maison de la Culture de Bourges, où il avait modernisé la programmation, favorisé les coproductions lyriques et redynamisé cette institution emblématique. En 2011, il avait succédé à Pierre Ascaride à la direction du Théâtre 71, Scène nationale de Malakoff, où il avait enrichi la saison d’une programmation musicale ambitieuse, en lien notamment avec Yves Rousseau et Régis Huby. De retour en Normandie en 2019, il avait pris la direction de l’Orchestre régional, y poursuivant son rayonnement territorial et plaçant la musique au cœur d’une relation vivante avec les publics. Pierre-François Roussillon s’y était investi avec la passion et la finesse qu’on lui connaissait, marquant profondément musiciens, équipes et publics. Ce grand amateur de jazz laissera le souvenir d’un faiseur de liens et d’un bâtisseur de ponts entre les disciplines qu’il aimait tant mêler. »

On ne l’oubliera pas. Si fin interprète, si puissant directeur, si original, sensible et audacieux.

Empruntons au grand quotidien Ouest-France ces vérités : « En 2006, il quitte la région pour diriger la Maison de la Culture de Bourges (Cher), puis le théâtre 71 de Malakoff (Île-de-France) en 2010. Retour aux sources en 2019, à la tête de l’Orchestre régional de Normandie (ORN) à Mondeville, près de Caen (Calvados). Un orchestre de dix-huit musiciens qu’il rêvait de « faire rayonner au niveau national » , nous confiait-il à son arrivée. On connaît la suite : à la rentrée 2024, l’ORN a fusionné avec l’Opéra de Rouen et Pierre-François Roussillon s’en est allé. »