Avignon renoue avec le charme du lieu qui fut des années durant le cœur du festival. Gwenaël Morin propose une version qui lui ressemble du Songe d’une nuit d’été. Six comédiens, deux filles, quatre garçons, s’amusent, aussi précis qu’apparemment désinvoltes.
On ne sait pas pourquoi on est toujours de plain-pied avec la manière de Gwenaël Morin. Mais depuis Aubervilliers, on le suit, on le retrouve. On observe certaines évolutions, mineures. Car, ce qui est clair avec cet artiste singulier, c’est qu’il n’a jamais dévié de sa ligne, de sa manière d’offrir le théâtre aux spectateurs. Et d’engager les interprètes !
Dans le jardin de l’Hôtel de Mons, qui abrite la Maison Jean Vilar et une antenne de la Bibliothèque de France, après un parcours qui nous conduit à traverser l’exposition consacrée à Catherine Sellers, comédienne frêle, brune et flamboyante, (1926-2014), très forte personnalité dont on reparlera, on débouche sous les grandes lanternes rondes et blanches qui éclairent l’espace, comme deux lunes gigantesques.
Si la pelouse est jaune et râpée, après tant de sécheresse, les arbres conservent leur beauté altière. Une forêt ? Oui. Il suffit de croire William Shakespeare…et Gwenaël Morin.
Malin, il fait comme Chéreau, il s’appuie sur la traduction de François-Victor Hugo. Il se sert de la justesse, de la loyauté du travail, mais il s’en libère lorsqu’il le faut. Le spectacle pourrait être circonscrit à une série de courses-poursuites, avec dédoublement vertigineux des rôles, transformations à vue, insolence, éclats de rire, effusions, bousculades, trahisons, philtres, plantes magiques, métamorphoses, jusqu’au théâtre dans le théâtre avec la très triste histoire de Pyrame et Thisbé, jouée par des artisans, scène irrésistible de l’œuvre.
Virginie Colemyn et Barbara Jung, fortes personnalités, sensibles et vives, sont idéales et s’amusent de tout leur talent et leur intelligence. Les garçons, eux aussi, sont vifs et cocasses. Grégoire Monsaingeon, Jules Guittier, Nicolas Prosper, Julian Eggerickx, pour les citer dans le désordre, sont épatants. Il faut accepter les partis pris. Rien de prétentieux, mais un cadeau pour les spectateurs, heureux, dans ce jardin, la nuit.
Maison Jean-Vilar, jusqu’au 24 juillet, à 21h30. Reprise à La Villette, Grande Halle, du 27 septembre au 20 octobre, avant une longue tournée jusqu’au printemps 2024, au moins.