Aux Abbesses, il met en scène sa pièce « J’ai trop d’amis » et dirige des comédiennes exceptionnelles. Du théâtre pour le jeune public qui fait l’admiration des adultes.
Il y a plusieurs années, dans une école communale du centre de Paris, non loin du Théâtre de la Ville, nous avions vu J’ai trop peur formidable spectacle écrit et mis en scène par David Lescot. C’est vif, drôle, juste, joué avec allégresse par de jeunes comédiennes dans des rôles de plus jeunes qu’elles encore.
On n’avait jamais oublié ce merveilleux moment et depuis on a eu plusieurs fois l’occasion d’applaudir les écrits et mises en scène de David Lescot, dans des registres très différents.
Dans le cadre du programme de « L’Eté solidaire » mis en place par Emmanuel Demarcy-Mota et ses équipes, on découvre dans la salle des Abbesses cette suite, J’ai trop d’amis.
On est du côté du collège. Entrée en 6ème et règles terribles de la dispersion : le narrateur, désigné comme « Moi » espère qu’il va retrouver sa classe et intégrer comme tous ses copains et copines la 6ème C. Mais non, en l’envoie en D et là, il va apprendre la dure loi d’une bande soudée autour du personnage de Clarence, le plus « populaire ». Le chef.
Il y a d’autres personnages : la petite sœur de « Moi ». Et puis Basile et Marguerite. Des élèves de la classe.
Ils sont interprétés par trois artistes très douées et dirigées d’une main de maître par l’auteur lui-même. Suzanne Aubert est « Moi ». Camille Roy est, entre autres, la petite sœur tandis qu’Elise Marie passe elle aussi d’un personnage à l’autre avec maestria.
Pas d’autre décor qu’un grand coffre à transformations que les trois filles manipulent avec une dextérité idéale. Salle de classe ou banc, maison, tout change à toute allure, comme les comédiennes changent de personnages. Une scénographie de François Gautier Lafaye accompagnée des lumières de Guillaume Rolland.
C’est éblouissant et écrit avec une précision de musicien –qu’il est aussi- par David Lescot. L’effervescence des talents réjouit, enthousiasme. On rit, on est ému, on admire tant de virtuosités, de justesse.
Fine et déliée, Suzanne Aubert, qui signe également les costumes, est un merveilleux jeune garçon qui va vivre cette 6ème D en oubliant ses copains de CM2. Elle trouve le ton juste, l’apparence, les gestes d’un adolescent. Irrésistible, Camille Roy compose cette petite sœur qui parle tout le temps, à toute allure, en mangeant les mots ou en les confondant. Elle est franchement incroyable mais c’est qu’elle peut s’appuyer sur une véritable partition ! La rousse Elise Marie a le redoutable privilège de prêter sa jolie silhouette au dominant Clarence, entre autres. Elle est formidable et se glisse dans les répliques et silhouettes de Marguerite et de Basile comme par enchantement.
D’autres jeunes comédiennes jouent en alternance et l’on ne doute pas que David Lescot les ait aussi bien choisies et dirigées. Chacune passe d’un rôle à l’autre et il arrive que les photographies que correspondent pas au trio que l’on a applaudi !
Un régal de spectacle. Cinquante minutes d’intelligence vive et de théâtre total !
A voir et revoir d’urgence !
Théâtre de la Ville aux Abbesses, dans le cadre de L’Eté solidaire. Jusqu’au 29 juillet, à 15h00 et 19h00. Gratuit pour les moins de 14 ans et les personnels soignants. Tél : 01 42 74 22 77.
Comédiennes en alternance en plus des trois que nous avons vues : Charlotte Corman, Théodora Marcadé, Caroline Menon, Lyn Thibault, Marion Verstraeten.
theatredelaville-paris.com
Texte publié par Actes Sud-Papiers, collection Heyoka jeunesse (10€). Avec des très jolies illustrations d’Anne Simon. Dans la même collection, et avec des illustrations d’Anne Simon également « J’ai trop peur » (2014).
Reprise du spectacle du 4 au 14 novembre, Espace Cardin, Studio.