En un combat sans merci

Jacques Descorde est un auteur que l’on apprécie depuis longtemps; Avec « Ce que nous désirons est sans fin », il pousse très loin la représentation de l’opacité de la haine Il signe une mise en scène tranchante, dirigeant trois comédiens qui ne craignent pas la violence.

On a vu relativement souvent des créations de Jacques Descorde. Ici à Avignon, ou à Paris. Il est du Nord. Il a fondé la compagnie des Docks. Par lui on avait connu les premiers textes de la très regrettée Emmanuelle Marie. Le temps a passé, Descorde poursuit son chemin, dans l’intransigeance. Et une reconnaissance certaine. Ce texte, qui date de quelques saisons, (il a été « finalisé » à la Chartreuse de Villeneuve, en 2019), a été publié et paraît aujourd’hui sur la scène dans une mise en scène de l’auteur et dans une scénographie tout en lignes pures et lumières signée Camille Allain Dulondel. Des lumières d’Arthur Gueydan, une création vidéo, discrète mais très éloquente, de Fanny Derrier parachèvent l’esprit d’une représentation très soignée. La musique y tient une part importante, on peut penser que l’auteur- metteur en scène a choisi les pages retenues, célèbres ou non.

On nous dit que Jacques Descorde s’est inspiré d’un événement qui l’avait frappé, il y a quelques années. Le parricide perpétré par le fils d’un journaliste connu. L’adolescent était sous l’emprise d’un ami qui semblait l’avoir manipulé.

Pas de scène d’exposition. On est immédiatement sur le ring de l’affrontement sans merci d’un père et d’un fils. Pas de femme, dans ce monde de violence et de désir forcené de disparition. Comme si la simple existence de l’autre était insupportable.

La relation du fils, Gaspard Liberelle, et de son ami, Cédric Veschambre, est marquée par une ambivalence aussi impressionnante que terrorisante. Ce « ni avec toi ni sans toi », fonctionne ici comme une corde qui les étrangle et leur projet de mise à mort va les ligoter dangereusement.

Ici, finalement, ce n’est pas le père, Patrick Azam, qui sera occis. Jacques Descorde ne se complaît pas dans une histoire glauque. Il fait peser d’entrée une menace angoissante sur les trois personnages. La violence débridée impressionne.

Le texte est tenu, tendu. Jacques Descorde a du style, une écriture. C’est à ce seul prix que l’on peut supporter cette « pièce », ce « spectacle ». Car on est éprouvé, mis à mal, jusqu’à l’insoutenable. Mais les interprètes, vifs et réactifs, sont excellents et l’on n’oublie pas que nous sommes ici au théâtre.

Présence Pasteur, à 12h50 jusqu’au 21 juillet. Relâches les 9 et 16. Durée : 1h20. Texte publié par L’Oeil du souffleur.