« La Ménagerie de verre » en toute fidélité

S’appuyant sur la traduction d’Isabelle Famchon, le metteur en scène Philippe Person a réuni un quatuor d’interprètes sensibles, pour une version sobre et souvent forte de la pièce de Tennessee Williams.

Pour qui aime le théâtre, La Ménagerie de verre de Tennessee Williams est l’une des plus belles pièces du répertoire dramatique occidental. En France, elle est souvent reprise et les mises en scène sont intéressantes : l’œuvre est forte de la sincérité même de l’auteur qui se souvient là de sa jeunesse. La vérité des personnages touche. On connaît Amanda, la mère, qui se bat comme elle peut. Des années auparavant, son mari, le père de ses deux grands enfants, Laura et Tom, a abandonné la famille. Sa photo est toujours là…Tom travaille dans une usine pour soutenir sa mère et sa sœur. Il rêve d’écrire. Sa mère fantasque, ravissante comme l’éblouissante jeune fille qu’elle a été, dépressive sinon désespérée, rêve de marier Laura, complexée, renfermée et très timide. Elle collectionne des petites figurines de verre, c’est la « ménagerie ». Elle demande à Tom de présenter un de ses amis à sa sœur. Ce sera Jim, que Laura a connu au lycée.

Tout va tourner vinaigre.

Dans le petit espace de la salle dite « Paradis », on est au plus près des interprètes, dans les lumières de Tom Bouchardon, un décor simple de Vincent Blot.

Philippe Person qui signe la mise en scène, s’appuie sur la traduction excellente d’Isabelle Famchon. Elle garde les mots qui peuvent sonner étranges aux jeunes oreilles : on parle de « galant » pour désigner le jeune homme qui pourrait s’intéresser à la jeune fille de la maison, la sortir… Cela signe aussi le décalage d’Amanda qui en est restée à sa propre jeunesse et à aux règles de son époque.

Florence Le Corre déploie sa nature puissante. Elle est une artiste associée au chemin de Philippe Person. Elle ne craint pas sa liberté.

Sa fille est interprétée par la sensible Alice Serfati, qui surligne un peu la gaucherie, le mal être de Laura. La scène, si bien pensée par Tennessee Williams, qui met longuement face à face Jim et Laura, est bouleversante. Extrêmement bien dirigée par Philippe Person, excellemment interprétée par Alice Serfati et Antoine Maabed, très délicat et fin dans son jeu.

Blaise Jouhannaud, lui aussi, donne une force certaine à Tom. Il est très vrai dans les variations des pensées du jeune homme, de ses sentiments, de ses souffrances.

Philippe Person réussit à donner une unité, une harmonie à un quatuor qui compte une artiste de grande expérience et talent depuis longtemps reconnu, et à trois jeunes, très frais, très bien dirigés. Un spectacle homogène, cohérent, très émouvant. Du Tennessee Williams, en toute fidélité.  

Lucernaire, salle Paradis, à 21h du mardi au samedi, dimanche à 17h30. Durée : 1h20. Jusqu’au 1er juin. Tél : 01 45 44 57 34.www.lucernaire.fr