Sur scène, ils sont deux. Dans le secret de fabrication de ce spectacle intitulé « La Tête ailleurs », ils sont un peu plus. Le résultat : une heure à peine de folie pas tempérée du tout, un grand souffle d’intelligence, de talent, de jeu.
On ne les connaissait pas. Ils sont plutôt, pour le moment, du côté du cinéma, de l’écriture de séries, de la musique. Loin des planches, loin du théâtre. Et pourtant, lorsqu’on les découvre, sur la scène amicale et fertile du Théâtre de Belleville, on ne peut qu’être soufflé par le vent puissant de leur imagination, de leur présence, de leur liberté.
Ici, comme chez eux, Camélia Acef et Youri Rebeko. Magistralement guidés par leur ami Victor Bourigault, qui signe la mise en scène, enrichie de chorégraphie par Eva Tesiorowski, dans un univers faussement désordonné signé Laetitia Yturbe.
Ils admettent que la comédie-musicale les intéresse. Ils font observer que la manière dont les protagonistes prennent la parole en chantant, est le plus souvent inepte. Une convention que l’on accepte. Et eux, dans La Tête ailleurs, que font-ils donc ? Ils tentent de nous faire comprendre le destin cruel de Norah. Elle a du mal à se concentrer. Elle entend des chansons. Plus tard on comprendra que ces airs, ces mélodies, ces paroles, sont ceux d’un jeune homme mort accidentellement.
Avouons-le, l’éblouissant talent des deux partenaires, balaye tout désir de comprendre exactement où ils souhaitent nous mener. Habiles aux transformations, aux ruptures de ton, drôles, séduisants, électrisants, cocasses, bouleversants –attention, c’est le rire qui domine !- ils sont chacun un et plusieurs, nous entraînant dans leurs aventures irrésistibles.
Camélia Acef, formée comme scénariste et habile aux écritures, Youri Rebeko, scénariste aux collaborations prestigieuses (Verhoeven, Serebrenikov), musicien et compositeur, ont unis leurs éclaboussants talents dans La Tête ailleurs. Elle est aussi touchante que déjantée, aussi fine qu’exagératrice. Lui, diable aux mille et unes métamorphoses, nous arrache flots de larmes et noue nos corps de crampes de rires.
Leur ami et metteur en scène, Victor Bourigault ne les lâche pas. Un spectacle aussi apparemment fou que strictement réglé. Du très grand art, porté par de jeunes artistes merveilleux. Séduisants, professionnels, hyperdoués, originaux.
A voir et revoir. Sans mesure. Leur compagnie a pour nom : « Minds at Work ». Elle a été fondée en 2022 avec leur copine de Sciences Po, Lucie Brongniart, administratrice. La Tête ailleurs est le premier spectacle écrit et produit par Minds at Work. Ca carbure pas mal…Ca promet.
Théâtre de Belleville, lundi et mardi à 19h15, dimanche à 20h00. Durée : 1h00. Tél : 01 48 06 72 34. Jusqu’au 30 septembre. Puis au Centre Paris Anim’ Ruthe Bader Ginsburg dans le 1er arrondissement.
A souligner, également à l’affiche, l’excellent travail de Sylvain Maurice sur un texte d’Emmanuelle Bayamack-Tam, Arcadie. Avec une comédienne que l’on a souvent applaudie, Constance Larrieu. Les mercredi, jeudi, vendredi, samedi, dimanche. A 19h15, 21h15 ou 15h00. Durée : 1h10. Jusqu’au 30 novembre.