Dans la grande salle de La Colline, l’artiste née à Palerme, présente un conte féroce qui fait rire le public. Re Chichinella (Le Roi Poule) est un spectacle bref et cocasse, superbement conduit. Mais on est loin des plongées sociales, politiques, religieuses qu’elle maîtrise à merveille.
Emma Dante est une grande artiste qui, au-delà d’un univers esthétique puissant, pousse loin ses réflexions sur le monde. Elle impressionne.
Avec Re Chichinella, elle clôt une trilogie inspirée du Conte des contes de l’écrivain napolitain du XVIème siècle, Giambattista Basile.
Après La Scortecata et Pupo di zucchero -contes d’ailleurs présentés à la Colline il y a près de deux ans-, Re Chichinella, donné dans sa langue napolitaine, mais dans une adaptation d’Emma Dante qui signe l’ensemble du spectacle (texte, scénographie, costumes, mise en scène et sans doute choix des musique), est un divertissement réjouissant et en même temps un peu effrayant. Il y a du cauchemar ici.
A commencer par le cauchemar que vit le Roi. Il a voulut faire comme Gargantua. Il s’est essuyé le postérieur avec une poule duveteuse. Il la pensait occise. Mais; bien vivante, elle pénètre dans le corps du malheureuse monarque, et le torture atrocement. La cour ne voit pas cela d’un mauvais oeil car des oeufs d’or s’échappent du royal postérieur. Un cauchemar, n’est-ce pas…
Deux serviteurs, accompagnent le souverain magistralement incarné par Carmine Maringola, qui, tout au long de la représentation joue de toutes ses fibres, jusqu’à son ventre…Incroyable…
Il n’y a pas que la poule qui le torture : sa femme, la Reine, formidablement incarnée par Annamaria Palomba, qui se défigure en méchante idéale, ne le laisse jamais tranquille ! Sa fille, plus gentille apparemment, est aussi exaspérante, jusque dans sa bienveillance. La délicieuse Angelica Bifano et une princesse parfaite !
Emma Dante a su composer un spectacle étonnant, d’une forte esthétique et dirige treize interprètes aussi doués pour la danse, le mime, la musique des voix, les regards, les chorégraphies, que pour un jeu qui touche.
On y croit. On est dans le conte et l’on s’émeut.
N’en disons pas plus. Emma Dante est une femme d’esprit, une formidable dompteuse de fantasme. Tout cela en une heure ! Avec de très bons surtitrages, un peu de français et des musiques venues de Franco Battiato, Stefano Landi et avec des pages que vous reconnaîtrez de Haendel et de Scarlatti.
La Colline, grand théâtre, mardi à 19h30, du mercredi au samedi à 20h30, dimanche à 15h30. Les samedis 18 et 25 janvier, à 17h30 et 20h30. Relâche le dimanche 12 janvier. Durée : 1h00. Jusqu’au 29 janvier.
Tél : 01 44 62 52 52.
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