Indomptable fondateur-directeur de La Comédie Italienne, il nous propose avec « La Valse du Guépard », un voyage en Sicile, du chef-d’œuvre de Tomasi de Lampedusa au film de Visconti. Une fantaisie savante et merveilleusement interprétée.
Il y a des lieux où l’on se rend avec impatience et gourmandise. La Comédie Italienne, rue de la Gaîté, est de ceux-là. Avec sa façade d’un bleu céleste et ses fresques intérieures qui évoquent Venise, il tranche franchement dans une rue qui abrite beaucoup de salles, mais qui est devenue une longue suite de terrasses avec la réouverture partielle des bars et restaurants.
Longtemps on y a applaudi le grand Carlo Goldoni, mais aussi des textes composés par le maître des lieux, Attilio Maggiulli, malin comme un Arlequin et savant comme son patron de légende, Giorgo Strehler.
A la Comédie Italienne, d’ailleurs, les costumes sont souvent des rescapés des collections du Piccolo Teatro de Milan, et en tout cas, ils sont issus d’une inspiration identique. C’est-à-dire que tout y est beau, élégant, étonnant.
Après Le Mouchoir de Marilyn Monroe, un texte né des aventures d’Attilio Maggiulli lui-même, on peut, en ce moment, découvrir La Valse du Guépard.
Dans un décor impressionnant qui nous plonge dans les catacombes du Couvent des Capucins de Palerme, l’un des lieux les plus étonnants d’Europe, ce magicien de Maggiulli, (qui concocte lui-même les scénographies), donne vie à Tomasi de Lampedusa, l’excellent Vincent Morisse. Dans les lumières de Gilles Thomas, l’auteur voit paraître deux de ses personnages essentiels : Angelica, riche héritière bien cassée par le temps, loin de la stupéfiante beauté de Claudia Cardinale dans le film de Luchino Visconti. Elle est interprétée par une ravissante et très douée comédienne italienne, Valentina Vandelli. L’autre est Concetta, fille du vice-roi de Lampedusa, qui avait été promise en mariage à son cousin Tancredi. Dans le film, elle n’apparaît pas avec la place qu’elle occupe dans le livre. Ici, c’est la magnifique Hélène Lestrade qui lui donne vie, sensibilité, mélancolie, noblesse, amertume, douleur. Cette artiste cofonda la Comédie Italienne en 1974, avec Attilio Maggiulli qui lui a offert de très beaux rôles au fil de ces dizaines d’années.
Mais c’est à elle, aussi, que la Comédie Italienne, doit sa force, doit le fait que l’on veut toujours retrouver le lieu. C’est une interprète exceptionnelle et toujours aussi belle, fine, profonde.
Un moine muet garde les catacombes, c’est Jean-Louis Zentelin qui lui prêtre sa présence énigmatique tandis que « off », Jean-Jacques Pivert installe l’action.
Assisté de Claudine Durand-Simon, Maggiulli s’appuie sur un autre auteur : Balthazar Castiglione, écrivain et diplomate de la Renaissance (1478-1529), et son livre unique connu de ses pairs, à travers les âges, Le Livre du courtisan.
Ainsi que le précise Attilio Maggiulli dans le livret, très précieux, qui est remis aux spectateurs de La Valse du Guépard, Castiglione était ami de Raphaël et l’on peut admirer son portrait au Louvre.
Par-delà le jeu idéal, l’exquise originalité du propos, on applaudit une aventure théâtrale rare et riche de sens. Allez vite applaudir ces artistes vaillants, intelligents, fiers. Une équipe artistique d’excellence, à tous les postes. Et des femmes et des hommes qui sont d’une générosité rayonnante. On comprend ici combien le théâtre importe aux spectateurs et à la Cité.
Comédie Italienne, 17-19 rue de la Gaîté, 75014 Paris. Horaires à préciser avec les changements d’horaire du couvre-feu. Ainsi, à partir du 19 juin, selon les jours, ce sera 19h00 ou 20h30.
Tél : 01 43 21 22 22
Site : comedie-italienne.fr