Un auteur qu’elle n’a jamais quitté. Des textes brefs, des poèmes, la complicité harmonieuse d’un musicien, David Venitucci. Un moment de partage, de lucidité, d’émotion sous le regard de Patrick Bonnel.
On l’a toujours associée au grand dramaturge, à son intelligence lucide, sa vitalité, sa joie, sa sensibilité. Pourquoi ? Parce qu’elle fut une exceptionnelle Jenny dans une mise en scène de Marcel Bluwal. C’est à ce grand artiste, homme de théâtre, de cinéma, de télévision, subtil pédagogue également. Marcel Bluwal fut le professeur d’Ariane Ascaride au Conservatoire. Il fit travailler Mahagonny à ses élèves. Un si bon travail qu’il fut quelques mois plus tard présenté au Théâtre de l’Est Parisien, le TEP de Guy Rétoré.
C’était autour de 1975, sans doute. Depuis Ariane Ascaride a fait du chemin. Au théâtre qu’elle n’a jamais quitté, mais aussi au cinéma, bien sûr. Dans sa vie, il y a les films de Robert Guédiguian. Une vingtaine. De beaux personnages, un césar, un prix d’interprétation à Venise et des engagements clairs et sans faiblesses.
Ils ont une conscience aigüe du monde, de la société. Ils ne font pas de discours : ce sont des artistes, ils racontent des histoires, ils créent. Pour la première fois, la société Agatfilms et cie s’engage au théâtre et produit ce Du bonheur de donner. Ou « Brecht sous l’angle de sa bienveillance » dit le cinéaste.
Tabouret, micro sur pied, lumière. Elle est de noir vêtue. A ses côtés, qui suit attentivement les textes lus, les chansons, le musicien David Venitucci, qui sait trouver les couleurs, les justes accords.
On écoute. Des poèmes, des observations, Du bonheur de donner est au coeur du déroulé. Traduit par Eugène Guillevic, un poème pur et simple. Ariane Ascaride a puisé dans des recueils divers, diverses traductions. L’ensemble est homogène et respire. On sourit, on rit, on a le coeur serré. C’est l’homme, le sujet, le propos. L’humain, ses faiblesses et ses grandeurs.
Les feuilles glissent. La musique va. Il y a l’inaltérable enfance d’une petite fille juchée sur un tabouret. Ses grands yeux sombres interrogent. Elle prend à témoin, partage. Elle est mise en scène avec délicatesse par Patrick Bonnel. Rien ne pèse. Certains propos de l’écrivain sont graves. Ils semblent avoir été écrits hier. Ils nous concernent, ils sont comme tirés du pur présent.
La pensée qui lie toutes ces fusées multicolores pourrait être : « accueillir ». Accueillez l’autre. Il est votre semblable. Ouvrez vos coeurs. Ne craignez pas les sentiments.
Lecture idéale, voix bien timbrée et tendre. Ferme. Il faut se laisser charmer, mais surtout l’écouter. Elle, et son ami de longue date, Brecht.
La mélancolie peut vous envelopper. On se souvient qu’au Lucernaire, aussi, Ariane Ascaride partagea un très beau moment de poésie sur des paroles de Louis Aragon, Elsa Triolet. C’était avec Didier Bezace.
Lucernaire, à 19h00, du mardi au samedi, dimanche à 16h00. Durée : 1h15. Jusqu’au 5 mars. Tél : 01 45 44 57 34.
www.lucernaire.fr