Elle a écrit, met en scène, joue « Nageuse de l’extrême », d’après des récits de Marion Joffle. Sur le plateau de Théâtre Ouvert, qu’elle partage avec Léna Bokobza-Brunet, un miracle d’intelligence et de sobriété.
Le public descend jusqu’en bas de la salle de Théâtre Ouvert et monte sur le plateau. A cour et à jardin, des rangées de chaises blanches, et, à l’arrière quelques bancs. A la place du 4ème mur, d’autres rangées de sièges. Ainsi cadré, un espace à peu près carré, parsemé de blocs immaculés qui évoquent des petits fragments de banquise. Une jeune femme surgit, en maillot une pièce noir, bonnet sur la tête. C’est Léna Bokobza-Brunet, la « nageuse de l’extrême ». Elle traverse la Manche à la nage, entre l’Angleterre et la France…Un exploit réalisé pour soutenir la recherche médicale pour les enfants malades.
Un exploit aussi de donner une évidente vérité à ce moment : on la voit nager, littéralement. Le travail sur le mouvement est signé Sébastien Davis-Vangelder. Ajoutons les lumières de Bruno Marsol et la musique d’Etienne Bonhomme, autres subtiles palpitations.
Assise sur une chaise, une femme aux cheveux dégageant bien le bel ovale du visage, le regard. C’est Elise Vigier que l’on connaît très bien et que l’on a toujours admirée. Dans la pudeur, la retenue, sans crainte, parfois, de regarder franchement les spectateurs si proches, elle est celle dite « la femme », quand l’autre est « la nageuse ». Elle parle de « son » cancer. De sa voix ferme et claire, elle raconte. Sans fausse pudeur, mais avec sobriété.
C’est un moment bouleversant et sans surlignage de pathos. Elise Vigier a adapté une série de récits de Marion Joffle. Vous connaissez cette championne née en 1999, ravissante et attachante. Elle se jette dans les eaux glacées -d’où le décor de fragments de banquise…Celle que l’on surnomme parfois « le pingouin souriant » a connu, enfant, le cancer. Elle dédie ses exploits aux enfants malades. Si vous n’en savez pas plus sur sa vie, lisez la ! Regardez des vidéos…
Avec tact, et une intelligence dramaturgique profonde, Elise Vigier tresse la vie de deux femmes. Deux combattantes : la plus jeune des deux, la nageuse, dans l’exploit, l’effort, le dépassement de ses limites. Elle est accompagnée d’un bateau de surveillance. Elle boit du thé chaud, de temps en temps, comme un enfant au biberon. Léna Bokobza-Brunet, prête sa belle lumière à celle qui est en réalité l’auteure, Marion Joffle.
L’autre, un peu plus âgée, se bat contre le cancer. Mais elle est plus seule. Des salles d’attente pourtant bondées, aux avis des médecins, une femme qui lutte contre un cancer, est effectivement plus isolée. Elise Vigier, nuancée, subtile, est fascinante.
En à peine plus d’une heure, du vrai grand théâtre, qui éclaire et émeut, fait réfléchir et comble.
Théâtre Ouvert, à 19h30 ce mercredi, à 20h30 jeudi et vendredi, 18h00 samedi. Durée : 1h10. Tél : 01 42 55 74 40. Texte publié par « : esse que » (10€).
Tournée : du 7 au 9 octobre, à la Comédie de Caen ; du 24 au 28 février, au Quai d’Angers ; du 2 au 4 avril au Point du Jour, à Lyon ; du 13 au 16 mai, au Quai d’Angers.