L’art de la subtilité

Composé par Kelly Rivière qui l’interprète face à Pierre Bidard, « Si tu t’en vas » est un texte touchant, mis en scène avec sensibilité par Philippe Baronnet.

Il suffit de peu pour faire du bon et du grand théâtre. Sur le plateau de la salle principale du Théâtre de la Reine Blanche, quelques tables et quelques chaises, dispersées. Une heure. Une situation simple d’apparence : un élève, un garçon de 17 ans, Nathan, vient trouver sa professeure principale, Madame Ogier. Il est en terminale. Mais il veut tout lâcher. Il est déterminé. Mais on devine qu’il aurait besoin de son assentiment.

On ne comprend les situations qu’au fil d’un dialogue extrêmement bien écrit par Kelly Rivière qui est décidément une artiste remarquable.

 Il vit seul avec son père, agriculteur. Sa mère est partie au loin. La ferme lui fait horreur et il a le sentiment d’encombrer son père. Il ne veut surtout pas lui succéder. Il est un enfant du XXIème siècle. Il revend des sneakers sur internet et rêve de partir, de rompre, de faire fortune au soleil.

Elle tente de le raisonner, de le retenir. Il l’interroge sur sa vie. Elle se livre.  Elle n’a pas d’enfant, mais s’occupe du petit garçon de 8 ans de son conjoint. Autrefois, adolescente, elle était championne de basket, mais elle a laissé passer une chance…

 Dans les lumières tendres d’Eliah Elhadad Ramon, le metteur en scène Philippe Baronnet, dirige avec intelligence et sensibilité les deux interprètes. C’est lui qui a commandé ce texte à Kelly Rivière, en marge de leur projet sur Mort d’un commis voyageur. Nathan doit son évidence au texte et au jeune comédien Pierre Bidard. Il est vif, vrai, très juste. Il a du charme et donne le sentiment d’un naturel très souple qui signe son grand talent. On la connaît mieux, par son écriture et son jeu. On avait été ébloui par An Irish Story, spectacle bilingue, sur ses origines. Elle a un grand sens du plateau par son écriture. Elle a beaucoup de présence et de personnalité par son jeu. Et tout cela sans micro ce qui fait du bien.

Bref : un grand moment de pur théâtre, jubilatoire et bouleversant. Souvent drôle. Et qui nous fait traverser une vaste palette de sentiments. Et qui, en plus, dit aussi notre société. Des élèves et des professeurs, filmés en petite séquence liminaire, en témoignent.

La Reine Blanche, samedi 25 novembre à 18h00, jeudi 30 novembre à 19h00, samedi 2 décembre à 18h00. Durée : 1h00. Tél : 01 40 05 06 96.

reservation@scenesblanches.com

Texte publié par les éditions Koine, en vente au théâtre.