Moins d’affiches, des règles strictes, toujours quelques parades en plein soleil, et l’impensable effervescence de 1.500 spectacles différents. Pour commencer, saluons des femmes grandes.
Christine Murillo, 10h15 à La Scala, Pauline & Carton
L’alliance de Pauline Carton qui s’éteignit en 1974 dans sa 90ème année après avoir tourné dès le cinéma muet et nous demeure très connue notamment grâce aux vingt-deux films pour lesquels Sacha Guitry fit appel à elle, et de Christine Murillo, met en appétit de théâtre… Si l’on en croit les précisions de l’interprète, elle fit il y a quelque temps, une lecture de la correspondance et de quelques extraits de ses souvenirs Les Théâtres de Carton, à Grignan. Aujourd’hui, mise en scène par Charles Tordjman qui signe également l’adaptation avec elle et avec Virginie Berling, Christine Murillo nous épate, nous enchante, nous fait rire, nous émeut. Dans les pas de la créatrice de « Sous les palétuviers », elle chante, change de registre et imite des artistes évoqués par la merveilleuse Pauline Carton, femme d’un seul amour, femme indépendante et libre que Sacha Guitry aimait et respectait profondément. Elle était une amie, mais aussi une collaboratrice très érudite et une critique écoutée par Sacha. Le visage tellement mobile de Christine Murillo, son regard, sa voix, tout ici tient du très grand théâtre. En une heure, on est au cœur d’un art maîtrisé, partagé, qui donne des ailes.
Catherine Jacob, 14h55 aux Gémeaux, Agathe Royale
Autre merveilleuse interprète, Catherine Jacob partage le plateau de la belle salle dite « de la coupole » avec un jeune comédien formidable, Brice Hillairet. La pièce, écrite par Jean-Benoît Patricot, saisit deux acteurs en pleine représentation. Mais ce jour-là, la célèbre tragédienne n’en peut plus. Elle craque en direct. Malgré l’aide de son partenaire, elle refuse de continuer. On bascule alors dans les confidences d’une femme paumée que rien ne semble pouvoir rassurer. Soudain la vanité de son métier lui apparaît et on devine que cet incident va se transformer, peut-être, en renoncement définitif. Avec son visage classique qu’éclaire une haute perruque blanche, la précision de sa voix, de ses regards, de ses expressions, Catherine Jacob est bien une reine. Mais Brice Hillairet est lui aussi formidable. Il possède un charme, une grâce, une présence très puissante, mais sans aucune agressivité. Il est doux, léger, malicieux comme un elfe shakespearien. Le metteur en scène Christophe Lidon orchestre ce dialogue, en s’appuyant notamment sur des séquences filmées, qui étoffent le texte sans jamais alourdir la représentation. Un travail fin et soigné qui, dès le premier jour a conquis le public.