Sébastien Castro, Michel Fau, irrésistibles

Deux grands interprètes sont réunis pour la résurrection d’une comédie idéale, Le Vison voyageur. Quelques représentations et un tournage pour la télévision.

Dans un Paris où les théâtres ne font pas assaut d’invention, cet été, c’est la nouvelle version d’un classique de la comédie anglo-saxonne qui aura fait les meilleures soirées de juillet. Le Vison voyageur, en effet, pièce créée en France dans une adaptation malicieuse du très doué Jean-Loup Dabadie, par Jean Poiret, Michel Serrault et Judith Magre, fut composée par l’hyper doué Ray Cooney, avec, pour cette œuvre immortelle, Ray Chapman. A Londres, c’est en 1968 que Not Now, Darling fut créée au Savoy Theatre, Londres. A l’époque, le monde entier fait son marché théâtral à Londres et les pièces traversent très rapidement l’Atlantique et la Manche.

Passons les épisodes : aujourd’hui, deux immenses interprètes reprennent donc ce chef-d’œuvre du rire…Mais pas seulement, car le secret des grandes comédies est lié à ce qu’il peut y avoir de tragique dans le destin profond des êtres…

A la Michodière, salle par excellence de Ray Cooney grâce à un homme de haute culture qui dirigea le théâtre, Jacques Crépineau, et Stewart Vaughan qui traduisait les pièces, on retrouve avec bonheur cette nouvelle mouture. Base du texte, Jean-Loup Dabadie et retouches efficaces des deux interprètes principaux, dont l’un, Michel Fau, signe la mise en scène, assisté de Quentin Amiot. 

Dans un décor unique fermé au fond par une large verrière qui donne sur la rue et laisse apercevoir une grosse horloge, tout se joue à folle allure. Ici, balancer par la fenêtre est un geste récurrent et très important. Au milieu, un large siège rond, faux Napoléon III, très chic, et, évidemment, des portes à cour et jardin –puisqu’il s’agit d’un vaudeville et qu’il faut apparaître et disparaître. Un décor de Nicolas Delas et des lumières de Joël Fabing.

A ce jeu, le personnage qu’incarne Armelle bat des records. Elle ne cesse de paraître et d’apparaître. Elle est la directrice relations publiques de la maison de couture. Elle est là pour régler tous les problèmes. Si c’est possible.  Jamais autant que sous la houlette de Michel Fau, Armelle n’a si bien usé de sa voix. Une véritable Diva, en quelque sorte…Stricte, élégante à la mode des années 70, du Cardin réinventé, tandis que ses patrons évoquent le très swinging London.

Au cœur de la comédie, il y a un manteau de vison blanc, aussi beau qu’oublié des rêves de dames aujourd’hui, en Europe. Mais cela marche encore ailleurs…

N’en disons pas plus. Présentons les protagonistes : Steve Bodley, Michel Fau, a pris un « coup de soleil » (comme disait l’inoubliable Margot Capelier) pour une femme qui va lui en faire voir.  Pour elle, il casse le prix du sublime manteau créé par son associé, Monsieur Crouch, incarné par le magistral Sébastien Castro. Inutile de dire que c’est un peu difficile à admettre…Et que dira le mari ? Et que diront les autres clientes et clients, s’il y en a…Et que dira l’épouse légitime ?

Raconter serait amoindrir l’efficacité volcanique de la comédie. Nicole Calfan, très chic bourgeoise au passé coquin, Anne Sophie Germanaz, Delphine Beaulieu, Laure-Lucile Simon, silhouettes de danseuses de music-hall, et talents effervescents, et ces messieurs, Alexis Driollet, Arnaud Pfeiffer, physiques qui comptent, sont tous épatants, emportés dans le tourbillon étourdissant des voyages du fameux manteau.

Le duo de Sébastien Castro et de Michel Fau est extraordinaire. De la délirante folie, à la panique, de l’exagération assumée à la vraie peur, tous les sentiments de ces deux personnages nous atteignent. Un regard, une posture, un geste, une intonation. Ils sont fabuleux. Leur rencontre sur un plateau est un événement ! Tous deux sont embarqués dans deux succès qui seront repris à la rentrée (Lorsque l’enfant paraît et Une idée géniale), mais vivement qu’ils retrouvent, pour notre plaisir, du rire à l’admiration du savoir-faire de l’auteur, une pièce qui leur aille aussi bien…Un chef-d’œuvre d’entente. Bien plus que d’immenses clowns, ce qu’ils sont, en plus, des artistes qui pourraient jouer Pouic Pouic comme Le Roi Lear. Ils possèdent la mélancolie des artistes au-dessus du lot commun. Des passeurs, des éclaireurs.

La Michodière, jusqu’au 30 juillet.

www.michodiere.com

Tél : 01 86 47 68 62.

Après les représentations de la Michodière, on retrouvera ce monument de rire au Théâtre Montansier, à Versailles, à la rentrée. france.tv, la Fnac et RTL sont partenaires de la production de 984 Productions et ADLTV.